This article is not available in English. You can read its French version.

Palais de plein air et acclimatation

Published on 30 May 2017

Les palais de plein air

Après les premiers aménagements d’Amboise et de Blois, l’art des jardins « à la française » gagne progressivement l’ensemble des châteaux du Val de Loire. Le jardin devient ainsi au fil du temps un véritable palais de plein air où le propriétaire se donne en spectacle et accueille ses invités dans un cadre à sa gloire et qui le magnifie. 

L’ exemple des jardins du Domaine de  Chanteloup aujourd’hui disparus :  

En 1761, le duc de Choiseul acquiert le domaine de Chanteloup et décide d’agrandir les jardins et le petit parc selon une hiérarchie très classique. Ces premiers aménagements s’articulent avec l’ensemble du domaine et notamment avec la forêt d’Amboise. Elle est alors transformée en véritable « grand parc » grâce à des tracés géométriques complexes. Le duc fait également « conduire les travaux » d’importantes plantations.  

En 1770, suite à sa disgrâce, le duc de Choiseul vient résider sur ses terres. Il parachève alors son grand projet d’aménagement.  

Cette immense composition est marquée par la permanence de la régularité. Ce vaste chantier des « dehors » accompagne des développements de la demeure et s’inscrit dans une grande tradition du jardin français classique, poussée ici à l’extrême. On retrouve un grand axe d’eau qui monumentalise tout le paysage et un vocabulaire complexe des parterres, bassins, quinconces et autres formes compilées. Cependant, certains éléments comme les jeux des courbes des bassins et du bas des terrasses, les nappes et autres jeux d’eau complexes s’inscrivent dans le style des jardins rococo.  

Suite à ces aménagements se développe à partir de 1774 le projet d’un jardin anglo-chinois, selon le goût nouveau alors à la mode en France. Cette disposition vient se glisser à l’intérieur de l’emprise du grand jardin régulier. On passe alors des masses boisées géométriques et des bosquets réguliers d’origine, à la complexité des tracés, à la diversité des plantations pittoresques, aux lacis des chemins et aux regroupements d’arbres.  

Ce nouveau « goût mélangé », associe donc des grandes structures régulières à des parties traitées dans le nouveau style pittoresque.  

Le même modèle se retrouve à Menars, chez le marquis de Marigny. En 1773 s’ajoute la construction d’une pagode, dont le caractère chinois est plus à rechercher dans sa destination symbolique.  

Aujourd’hui ne subsistent que la pagode et la grande pièce d’eau, témoins de l’immense échelle de ce parc, qui fut parmi les plus monumentaux du XVIIIe siècle. 

Acclimatation et jardin exotique

Ouverture sur l’océan, corridor fluvial et climat propice, la Loire a  permis une migration floristique. Ainsi, prospèrent dans les jardins et sur les bords du fleuve une végétation exotique.  

Le XVIIIe siècle voit arriver par le port de Nantes des arbres et des herbes d’Amérique. La vallée constitue alors une véritable voie de pénétration pour ces végétaux appelés néophytes ou adventices, provenant de contrées éloignées. Leur collection fait l’objet d’une mode et les parcs et jardins des châteaux s’ornent alors de raretés botaniques.  

Le Val de Loire est ainsi un couloir de cèdres, chênes rouges, tulipiers, séquoias, noyer noir, frêne de Pennsylvanie… Il en ira de même des herbes et de petits végétaux ornementaux ou médicinaux.  

Bien des introductions sont à l’origine volontaires. Il s’agit le plus souvent de plantes ornementales ou alimentaires : l’érable argenté est planté dans les parcs ; les balsamines et les onagres sont semés pour la beauté de leurs corolles ; et la tomate elle aussi importée se reproduit désormais sur les alluvions.  

D’autres introductions sont en revanche fortuites : sacs de transport, effets personnels de voyageurs. La  migration s’est effectuée par la suite le long des routes ou des canaux, voire pour certaines plantes aquatiques, par les oiseaux.  

Ces plantes venues d’ailleurs ont trouvé des conditions écologiques favorables à leur acclimatation dans les eaux ou sur les berges de la Loire. Elles ont bénéficié de microclimats humides et chauds sur les sables et vases. Dégagés à l’étiage et surchauffés, ils offrent des conditions climatiques que l’on ne rencontre pas ailleurs dans le val.